Communiqué n° 437, 24 janvier 2018
AFFAIRE DERC’HEN / ROAZHON
Après l’affaire du petit Fañch(1) né dans la région de Kemper, c’est au tour du petit Derc’hen, n » dans la région de Roazhon, de se voir refuser le droit de porter le prénom choisi par ses parents.
Dans ces deux cas, ces prénoms ne sont pas des inventions, ils existent depuis toujours, seulement voilà: le 23 juillet 2014, une circulaire – circulaire s’appuyant sur la Loi n°118 du 2 Thermidor de l’An II (20 juillet 1794) – listant les signes diacritiques autorisés pour l’état civil français permet à des fonctionnaires de refuser tout prénom comportant des Tildes (ñ), des apostrophes etc.
Cette circulaire du 23 juillet 2014 précise les signes connus dans la langue française mais qui sont interdits pour l’état civil: à – â – ä – é – è – ê – ë – ï – î – ô – ö – ù – û – ü – ÿ – ç. Elle ajoute l’interdiction du ñ breton, le Lukasz polonais et la Sølvi norvégienne. Sont autorisées les ligatures æ et œ.
Précédemment, la Loi n°93-22 du 8 janvier 1993 a précisé le principe de liberté de choix du prénom, la principale limite étant celle de l’intérêt de l’enfant.
Nous nous retrouvons donc devant cette absurdité qui consiste à interdire des prénoms bretons à des enfants et d’autoriser des prénoms étrangers sur le même territoire breton, tout cela, dans le seul intérêt de nos enfants? Jugez plutôt:
1 – Alors qu’il est refusé le prénom Derc’hen à Rennes, pour cause d’apostrophe, sont enregistrés dans la même ville, des prénoms tels que Tu’Iuvés, N’Néné, D’Jessu et N’Guessan! Quelle contradiction!
2 – De plus en plus nombreux sont les enfants portant des prénoms inédits. Ainsi, peut-on trouver des enfants dans les écoles de la République Française portant des noms tels que Bambi, Biscotte, Clitorine, Débarah, Diam’s, Florineige, Fransisque, Freeman, Freedom, Jeanne d’Arc, Kader Oussel, Marge, Merveille, Magic, Noodles, Oméga, Peggy, Périphérique, Poulpe, Alpha, Pocahontas, Pâquerette, Skyler, Seven, Sissi , Thérébentine (fille d’une ex-Ministre), Trésor, Tudor, Vitella, Winnie etc. Où réside l’intérêt pour ces enfants de porter de tels prénoms si ce n’est de satisfaire l’imagination de leurs parents?
En l’espèce, le prénom Derc’hen n’est pas une invention, il est intégré à notre culture bretonne. La lettre « C » n’existe pas dans l’alphabet breton, ainsi entre les lettres « B » et « D », se trouvent deux lettres, « CH » et « C’H », lesquelles n’ont pas du tout la même prononciation!
Comme le précise Bruno Le Toullec, avocat au barreau de Nantes, cette circulaire n’interdit pas plus les apostrophes que les tirets: elle « a pour seul objet d’indiquer les voyelles et consonnes accompagnées de signes diacritiques qui sont considérés comme faisant partie de la langue française et ceux qui sont considérés comme n’en faisant pas partie. Elle ne traite en aucun cas des signes graphiques ou de ponctuation tels que les tirets ou les apostrophes (…)».
Bruno Le Toullec, avocat au barreau de Nantes, , 23 janvier 2018
Cette même circulaire précisant:
« Ces mêmes règles s’appliquent pour le nom de famille ainsi que toutes autres indications contenues dans les actes de l’état civil. Ainsi, par exemple, l’adresse d’un domicile à l’étranger ou le nom d’une personne même de nationalité étrangère doivent être indiqués avec les voyelles et consonnes connues de la langue française sans reproduire les éventuels signes diacritiques de la langue étrangère, non reconnues dans la langue française quand bien même ils auraient été indiqués précédemment dans un acte de l’état civil français de l’intéressé. »
Autrement dit: nombre de noms de famille ou de lieux-dits bretons ne respectent pas cette circulaire! La cité de Penmarc’h en Cornouaille ne devrait-elle pas changer de nom? Quant aux patronymes Guyomarc’h, Elgouarc’h ou Torc’h pour ne citer que ceux-là, ne sont-ils pas hors-la loi?
Quoiqu’il en soit: la discrimination linguistique est avérée car formalisant une inégalité flagrante!
Etant donné qu’il existe la Convention n°14 de la Commission Internationale de l’Etat Civile (CIEC), relative à l’indication des noms et prénoms dans les registres de l’état civil, reconnaît les signes diacritiques étrangers,
Etant donné que la France n’a ni ratifié ni signé la présente Convention,
Nous vous invitons à signer cette pétition afin que la France signe et ratifie ce qu’elle autorise déjà sur son territoire, alors que des textes tels que cette circulaire l’interdisent.
Au pays dit des droits de l’homme, lequel prétend être celui des Libertés, nul ne peut concevoir pareille discrimination, laquelle participe grandement à la disparition de la langue bretonne et à l’ethnocide aussi doux soit-il du peuple de Bretagne.
(1) Affaire FAÑCH « Pourquoi tant de Ñ ? », Communiqué Ambasad Vreizh n°431 du 20 juillet 2017
Signer la Pétition!